jeudi 6 août 2009

INTERVIEW AVEC Abdelhamid AMINE non publiée par L'OBSERVATEUR


Jeudi 6 Août 2009, 13h06
En juillet 2009, j'ai été sollicité par le journaliste LEMAIZI pour réaliser ,pour le compte de l'hebdomadaire marocain enfrançais L'OBSERVATEUR, une interview se rapportant au bilan des droits humains au MAROC durant les 10 dernières .

Le numéro 42 de L'OBSERVATEUR( aout 2009) consacré au bilan de la "nouvelle ère" est paru sans mon interview.Je n'enn'ai pas reçu d'explication; mais je pense que l'interview a été considérée comme atypique par la rédaction de l'hebdomadaire et qu'elle ne cadrait pas avec le reste des articles qui pour leur quasi totalité étaient très satisfaits du bilan.CI-JOINT LE TEXTE DE L'INTERVIEW.

Interview. Abdelhamid Amine, vice-président de l’AMDH
Depuis dix ans le Maroc a-t-il fait sa mue en matière des droits de l’homme ?
Il y a une idée préconçue que le pays n’a commencé à bouger qu’avec l’intronisation de Mohammed VI et le début de la dénommée nouvelle ère. Or, la question des droits de l’Homme était sur la table dès la fin des années 80 grâce à la lutte des démocrates marocains soutenus par les démocrates de l’étranger et aidés par le contexte mondial marqué par la chute du mur de Berlin qui a contribué à ce que des régimes comme le notre, semi-dictatoriaux ou dictatoriaux changent d’attitude vis-à-vis des droits humains.
Mais pour ces dix ans passés, quel bilan faites-vous, à l’AMDH, de cette période en matière des droits de l’Homme ?
Les progrès sont limités, les avancées partielles et les acquis fragiles, donc objets de régression faute de leur consécration par une constitution démocratique et de progrès simultanés au niveau du respect des droits économiques, sociaux et culturels. En gros le changement est essentiellement au niveau du discours de l’Etat, ce qui est peu important. Même les quelques acquis obtenus depuis les années 90 commencent à s’estomper. À partir de 2003, on vit une régression, notamment avec ce qu’on a appelé ‘’la lutte contre le terrorisme’’.
Tant que le Maroc continuera à vivre sous la constitution hassanienne de 1996, il ne peut y avoir de progrès significatifs. Il faut mettre en place les mécanismes de l’Etat de droit pour aboutir à une société citoyenne. En un mot le Maroc reste une ‘’démocrature’’ et la lutte pour le respect des droits de l’homme est encore de rigueur.
Le travail réalisé par l’IER constitue une avancée majeure tout de même…
Le travail de l’IER a son importance mais il est insuffisant, et de ce fait il n’a pu permettre de clore le dossier des violations graves qu’a vécues notre pays. L’IER a exclu de son champ d’activité la lutte contre l’impunité, et son pouvoir dans la recherche de la vérité a été limité, dans la mesure où l’instance n’avait pas de prérogatives pour fixer les responsabilités individuelles et institutionnelles. Il fallait par exemple déterminer quel est le degré de responsabilité de l’institution monarchique, de l’armée, des services de sécurité et du ministère de l’Intérieur.
Malgré tout, nous avons considéré que les recommandations de l’IER étaient positives et nous
continuons à demander fermement leur application intégrale. Seule la réparation matérielle a été
effective non sans plaintes d’ailleurs des concernés. Sur le plan de la réforme constitutionnelle, la
réforme de la justice et le contrôle de l’appareil sécuritaire, rien n’a été fait depuis.

Vous continuez toujours a demander des excuses de l’Etat sur les violations des droits de l’homme ?
À l’AMDH nous exigeons toujours que l’Etat présente des excuses au sujet des violations graves
connues par notre pays entre 1956-1999. C’est d’ailleurs une des recommandations de l’IER qui est restée sans suite.
Finalement, pour vous rien n’a changé ?
Ces dix ans ont été caractérisées par une inflation du discours officiel sur les droits humains et par un certain nombre d’initiatives et de signes positifs que d’aucuns, biens nombreux, ont considérés comme décisifs pour l’enracinement de la démocratie au Maroc. Tout cela était encadré par le slogan de la « transition démocratique ». Durant ces années il a été procédé à la mise en place de l’IER,
l’adoption de la loi sur la famille et de la loi contre la torture, la création du Diwan Al Madalim. Mais il y a eu aussi la continuité des violations graves liées à la répression politique surtout en liaison avec la stratégie sécuritaire de lutte contre le terrorisme dont la loi antiterroriste constitue une pièce maîtresse, une recrudescence des violations contre la liberté d’expression et la liberté de la presse,
la détérioration de la situation dans les prisons, la persistance de l’inégalité homme-femme,
d’énormes violations du droit au travail et des droits des travailleurs au vu et au su des autorités
concernées et de grandes violations des droits relatifs à l’enseignement, la santé, la sécurité sociale,
le logement, la vie digne, etc… En somme, notre pays n’a toujours pas accédé à l’ère de l’Etat de Droit et de la Société de citoyenneté à laquelle aspirent avec force nos citoyennes et citoyens.
Quel sera le défi en droits humains pour les années à venir ?
Le plus important des défis, c’est de doter notre pays d’une constitution démocratique, sans cela on ne pourra avoir un Etat de droit, une société citoyenne avec le respect profond des droits humains.

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